"Yuna en Lili" (photo M.V.) Stedelijkmuseum 2015 |
Lili Brik par Rodchenko 1925 |
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Lors du voyage d'étude à Amsterdam, il a été demandé aux TSTD2A de passer du temps à regarder les toiles de Mondrian et de Malevich exposées au Stedelijkmuseum.
Il était alors conseillé de noter immédiatement, de formuler avec le vocabulaire de l'instant, les impressions, les interrogations, les doutes ou les découvertes que suggérait cette vision muséale.
Ce topo ATC est la suite de cette expérience sensible in vivo, sous forme d'une synthèse rapide d'un document plus complet visible ici [http://arsalive.blogspot.fr/2013/11/k2m-kandinsky-malevitch-et-mondrian.html[ et téléchargeable en pdf ici [http://ahp.li/d4368c80905558aac136.pdf].
Quelques compléments :
- Chronologie comparée K2M / conception-créa Marc Vayer [télécharger le pdf]
- Le mouvement De Stilj. Dans le domaine pictural, le mouvement De Stilj se caractérise par une limitation stricte des moyens : http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-mondrian/ENS-mondrian.html
- Une petite histoire de l'abstraction : http://arsalive.blogspot.fr/2013/11/une-petite-histoire-de-labstraction.html
- Le minimalisme [Le minimalisme, première approche (©Eve Girardot)]
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Piet MONDRIAN
Dans l’environnement de l’entre-deux guerres, les artistes hollandais investissent le portrait comme un art à part entière. Ils redécouvrent le réalisme comme un humanisme.
Ce dessin témoigne d’une recherche personnelle de communication par la contemplation (mise en scène d’une démarche individuelle, spirituelle et stylistique). « La vie de l’homme cultivé se détourne peu à peu des choses naturelles pour devenir de plus en plus une vie abstraite »
À partir du XVIe siècle, au Pays Bas, se développe la tradition nationale du paysage, genre privilégié de la peinture flamande, avec un essor au XVIIe, avec notamment ce qu’on appelle le naturalisme de l’école de La Haye. Mais en 1890, émergence du symbolisme, du néo-impressionnisme, de l’art nouveau.
En 1892, découverte de Van Gogh, avec son expressionnisme chromatique, puis en 1897, le courant fauviste avec Van Dongen, puis, par le biais d’une exposition, en 1910, les tableaux cubistes sont introduits en Hollande.
En 1892, découverte de Van Gogh, avec son expressionnisme chromatique, puis en 1897, le courant fauviste avec Van Dongen, puis, par le biais d’une exposition, en 1910, les tableaux cubistes sont introduits en Hollande.
« La mer » 1887 Jan Toroop |
C’est le système de la théosophie, auquel il adhère en 1909, qui conduit peu à peu Mondrian à créer un langage visuel abstrait pour représenter l’harmonie de l‘univers.
L’ésotérisme exerce un attrait puissant sur nombre d’artistes épris de spiritualité, qui y découvrent un gisement inépuisable de symboles.
Ainsi, lorsque madame Blavatsky répand à sa façon le message de Platon selon laquelle « Dieu géométrise », elle retient l’attention fascinée d’un Piet Mondrian ou d’un Kasimir Malévitch.
Ainsi, lorsque madame Blavatsky répand à sa façon le message de Platon selon laquelle « Dieu géométrise », elle retient l’attention fascinée d’un Piet Mondrian ou d’un Kasimir Malévitch.
La couleur utilisée pour sa valeur émotionnelle dans le nuage rouge de 1907 atteste le changement qui s’est opéré dans l’œuvre de Mondrian. « La première chose à changer dans ma peinture fut la couleur, écrira-t-il en 1942, j’ai remplacé la couleur naturelle par la couleur pure. J’en était venu à comprendre qu’on ne peut représenter les couleurs de la nature sur la toile ».
• 1908 - Pendant la première moitié de sa vie, Mondrian est resté un peintre figuratif soucieux de représenter fidèlement les paysages typiques des Pays-Bas. C’est en 1908, à l’âge de 36 ans, que ses conceptions changent radicalement. Il se concentre sur une représentation simplifiée, et il le dit lui même, soit « pointilliste », soit « diffuse ». Dans Farbre, ces deux manières sont unies. Pas de profondeur, pas de modelé. « Regarder par delà la nature », « voir à travers celle-ci ».
• 1916 - En 1914, Mondrian rentre au Pays-Bas. Cherche à mettre en place une théorie. En 1916 : une seule toile abstraite : « composition ». Ce tableau tire son origine du tableau antérieur « L’église de Domburg », peint en 1911. À l’époque, il se compare volontiers aux bâtisseurs de cathédrales et Mondrian dit alors qu’il a voulu exprimer l’idée d’élévation. L’objectif du peintre est d’obtenir un mouvement dans le tableau.
• 1917 - Composition avec lignes est un tableau manifeste : aucun peintre occidental ne peut ignorer la force des références spirituelles du cruciforme, le seul signe admis par les iconoclastes, puis par tous les mouvements réformistes. C’est cette forme qui devient le principe unificateur des compositions de Mondrian. En effet, ce symbole spirituel, où les polarités fondamentales se neutralisent, devient le paradigme de la pensée plastique de Mondrian, qui vise à la synthèse des contraires. Ligne et couleur, trace et surface, masculin et féminin, spirituel et matériel, figuratif et abstrait, réalité et utopie sont des termes que l‘artiste tente de concilier à travers toute son œuvre.
• 1921 - Rentré à Paris, Mondrian réalise à partir de 1921 des tableaux qu’il nomme « néo- plastiques ». Complètement abstraits, ceux-ci reposent sur une harmonie où s’équilibrent des oppositions de plans unis de couleur primaire ou de non-couleur (blanc, noir ou gris) et un tracé linéaire épais. La peinture est véritablement pour l’artiste une affaire de morale, qui peut avoir des conséquences sur l’organisation de la vie toute entière et tend à la dépersonnalisation.
Mondrian se tiendra pendant vingt ans à ces principes généraux et au fil du temps, ses moyens se purifient : un seul blanc, trois couleurs, sans modulation et sans tracé visible du pinceau.
Mondrian se tiendra pendant vingt ans à ces principes généraux et au fil du temps, ses moyens se purifient : un seul blanc, trois couleurs, sans modulation et sans tracé visible du pinceau.
« Composition en rouge, noir bleu, jaune et gris » 1921 |
Lorsqu’il meurt le 1 février 1944, Mondrian laisse inachevé «Victory Boogie-Woogie», un losange qui tente d’aller plus loin encore dans cette «instabilité stable», en faisant éclater la couleur en une multitude de petits carrés
palpitants.
palpitants.
« Victor/ Boogie Woogie » 1943/44 |
Kasimir MALÉVITCH
Malévitch est ce qu’on appelle en russe un « samorodok », mot qui veut dire « pépite » et qui désigne au figuré tout homme exceptionnel, « auteur de sa propre naissance ». Fils d’ouvrier sucriers, en Ukraine, jusqu’à 27 ans, il ne savait même pas que le mot art existait. En 1910, à 32 ans, tournant décisif par la découverte du monde pictural des icônes et l’influence du néo-primitivisme de Larionov et Gontcharova, ce retour aux sources nationales de l’art populaire. De 1905 à 1915, avant le saut dans le sans objet, on peut discerner huit types différents de picturologie chez Malévitch.
C’est donc dans une série d’illuminations successives que Malévitch assimile en un temps record des cultures picturales qui faisaient partie de la pratique novatrice de son époque.
En 1915, l’avènement de ce qu’on appelle le « Carré noir » frappe par son caractère abrupt, inattendu et imprévisible, aussi bien dans l’œuvre de Malévitch que dans l’art du XXe siècle en général. La démarche de Malévitch est radicalement singulière dans le mouvement général qui, autour de 1913, s’éloigne de la figuration traditionnelle.
En 1915, l’avènement de ce qu’on appelle le « Carré noir » frappe par son caractère abrupt, inattendu et imprévisible, aussi bien dans l’œuvre de Malévitch que dans l’art du XXe siècle en général. La démarche de Malévitch est radicalement singulière dans le mouvement général qui, autour de 1913, s’éloigne de la figuration traditionnelle.
« vue de l‘exposition «0,10» » 1915 |
Le paysan, ou plutôt l’image d’un paysan anonyme à la barbe noire, habillé d’une chemise rouge, incarne le début de l’époque tragique de l’extermination des paysans russes en Russie Soviétique.
« Tête de paysan avec barbe noire » 1928 Malévitch
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p 150 Petit lexique de l’art moderne / Atkins
Suprématisme : Malévitch, Exter, Klioun, Popova, Pougny, Rozanova, Rodtchenko Le suprématisme est l’aventure artistique et spirituelle d’un seul homme, Malévitch, avec qui d’autres artistes font un bout de chemin sans le suivre très longtemps. L’artiste pose comme principe la «suprématie du sentiment pur» qui trouve un équivalent dans la forme pure, dégagée de toute signification symbolique ou rationnelle. Le vocabulaire se limite au carré, au cercle et à la croix. « La relation entre les éléments révélés dans le tableau constituent une nouvelle réalité, point de départ de la nouvelle peinture» (Ivan et Xéna Puni).
Suprématisme : Malévitch, Exter, Klioun, Popova, Pougny, Rozanova, Rodtchenko Le suprématisme est l’aventure artistique et spirituelle d’un seul homme, Malévitch, avec qui d’autres artistes font un bout de chemin sans le suivre très longtemps. L’artiste pose comme principe la «suprématie du sentiment pur» qui trouve un équivalent dans la forme pure, dégagée de toute signification symbolique ou rationnelle. Le vocabulaire se limite au carré, au cercle et à la croix. « La relation entre les éléments révélés dans le tableau constituent une nouvelle réalité, point de départ de la nouvelle peinture» (Ivan et Xéna Puni).
Vassily KANDINSKY
1896 À 30 ans, découvre les « meules » de Monet. Ce moment est décisif dans son passage à « l’art sans objet ». Décide de se consacrer à la peinture. Se fixe à Munich.
« J’avais jadis songé à faire une grande décoration avec ces mêmes « Nymphéas » pour thème, projet que je réaliserai un jour ».
Roger Marx, en 1909, dans la «Gazette des beaux-Arts» évoque de façon nouvelle l’œuvre de Monet. Il évoque l’aveu d’un « malaise » éprouvé au premier abord devant la monotonie apparente des toiles, le constat d’une rupture non seulement avec l’école de Barbizon, mais avec toute la tradition occidentale, le rapprochement, par l’intermédiaire d’un commun amour des plantes des œuvres symboliques du « Modem style» .
«meules» 1890-91 Claude Monet |
« J’avais jadis songé à faire une grande décoration avec ces mêmes « Nymphéas » pour thème, projet que je réaliserai un jour ».
Roger Marx, en 1909, dans la «Gazette des beaux-Arts» évoque de façon nouvelle l’œuvre de Monet. Il évoque l’aveu d’un « malaise » éprouvé au premier abord devant la monotonie apparente des toiles, le constat d’une rupture non seulement avec l’école de Barbizon, mais avec toute la tradition occidentale, le rapprochement, par l’intermédiaire d’un commun amour des plantes des œuvres symboliques du « Modem style» .
Roger Marx met dans la bouche de Monet ces propos : « Ceux qui dissertent sur ma peinture concluent que je suis parvenu au dernier degré d’abstraction et d’imagination allié au réel. Il me plairait davantage qu’ils y veuillent reconnaître le don, l’abandon intégral de moi-même. »
Mais Monet aura beau faire, le problème du plus ou moins grand degré d’abstraction qu’il convient de reconnaître aux Nymphéas est désormais posé, et le sera encore davantage à mesure que les séries se succéderont et que Fart abstrait lui-même acquerra un pouvoir d’attraction que le maître de l’impressionnisme ne pouvait pressentir.
Mais Monet aura beau faire, le problème du plus ou moins grand degré d’abstraction qu’il convient de reconnaître aux Nymphéas est désormais posé, et le sera encore davantage à mesure que les séries se succéderont et que Fart abstrait lui-même acquerra un pouvoir d’attraction que le maître de l’impressionnisme ne pouvait pressentir.
1918 Organise 22 musées de province. Le suprématisme de Malévitch et de ses élèves, d’un idéalisme beaucoup plus radical et d’une ambition plus universelle occupait alors le devant de la scène. Son système de formes géométriques flottant sur un espace indifférencié et renvoyant aux réalités éternelles d’un morne infini ne pouvait laisser Kandinsky indifférent. Une forte influence s’exerce alors sur sa peinture et de 1919 à 1920, provoque une décantation et une géométrisation très poussée, définitivement acquise en1922.
L’œuvre de Kandinsky est une œuvre en évolution constante, toujours subordonnée à la « nécessité intérieure », à la spiritualité. La nécessité intérieure désigne d’abord les périls à éviter, ceux des œuvres sans nécessité, décoratives, ornementales ou tout simplement expérimentales qu’on va voir proliférer dans l’histoire ultérieure de l’art abstrait.
Plusieurs étapes :
- Art nouveau et imagerie russe folklorisante
- Epuration progressive des formes du réel
- expression abstraite presque lyrique (1910-1914)
- Vocabulaire dépouillé, rigoureux des années Bauhaus
- Invention formidablement neuve de la période de Neuilly
Plusieurs étapes :
- Art nouveau et imagerie russe folklorisante
- Epuration progressive des formes du réel
- expression abstraite presque lyrique (1910-1914)
- Vocabulaire dépouillé, rigoureux des années Bauhaus
- Invention formidablement neuve de la période de Neuilly
“Dur et mou” Kandinsky 1927 |
“Ensemble multicolore” Kandinsky 1938 |
Il trouve des motifs du réel susceptibles de devenir autant de formes élémentaires que l’on peut combiner pour construire non pas une « image » (reproduction à l’identique du réel) mais le « tableau objet », dont la seule justification est l’organisation formelle.
Les montagnes deviennent des crêtes, les silhouettes des triangles, puis des accents.
Les liens évidents que " l'art sans objet» entretient avec certains aspects de la tradition spiritualiste de la fin du XIXe siècle, s’ils n’expliquent pas tout, constituent un aspect essentiel et relativement peu connu de la peinture abstraite.
Que Mondrian, Kupka, Kandinsky, Malévitch, Itten, Delaunay, les artisants de « l’art concret », « l’art pur », pour reprendre les termes qu’employaient Kandinsky qui les préféraient à l’art abstrait, se sient tous, à un moment donné de leur vie intéressés aux théories spiritualistes et théosophiques ne peut être considéré comme une coïncidence insignifiante.
Ces mouvements mettaient l’accent sur la nécessité de créer une esthétique qui fût capable de suggérer le monde des « réalités supérieures », l’ordre cosmique. Il témoignait également de l‘intérêt croissant pour l’occultisme et les phénomènes paranormaux. Se libérer du chaos du monde réel pour atteindre les territoires de l’esprit. « L’art est un moyen d’évolution de l’humanité. On progresse à travers un monde de formes qui va du réel jusqu’à l’abstraction. De cette manière l’on approche de l’Esprit ». Mondrian 1913.
Ce qu’il importe de souligner, c’est la différence essentielle qui sépare ces partisans de l’art pur des tenants d’une abstraction décorative de l’ordre du Jugendstil ou de cubiste comme Braque et Picasso qui, bien qu’ils eussent renoncé eux aussi à la figuration réaliste partaient de prémices radicalements différents d’où toute spiritualité (au sens ou l’entendaient Malévitch, Mondrian et Kandinsky) se trouvaient exclue.
Sources :• Kandinsky François le Targat Albin Michel 1986
• Kandinsky BeauxArts hors série 1991
• Mondrian Jacques Meuris NEF Casterman 1991
• De Van Gogh à Mondrian BeauxArts hors série 1994
• Mondrian Tashen 1995
• Le nuage rouge Yves Bonnefoy Folio (p51 Mondrian)
• BeauxArts magazine n°130 1995 Mondrian
• Malévitch Jean Claude Marcadé NEF Casterman 1990
• La Russie et les avant-garde Fondation Maeght 2003
• BeauxArts magazine n°143 1996 l’abstraction
• Petit lexique de l’art moderne Atkins
- - abstraction p 43 Kandinsky
- - der blaue reiter p 71 Kandinsky
- - die blauen vier p 75 Kandinsky
- - Bauhaus p 58 Kandinsky
- - cercle et carré p 60 Kandinsky-Mondrian
- - abstraction création p 43 Kandinsky-Mondrian
- - cubo-futurisme p 65 Malévitch
- - néo-primitivisme p ll2 Malévitch
- - suprématisme p l50 Malévitch
- - Merz p l04 Malévitch Mondrian (par Kurt Schwitters
- - de StijI p 74 Mondrian