mercredi 24 septembre 2014

Focus : Exposition Duchamp au centre Pompidou

Article d'Olivier Cena dans Télérama n°3374 du 13 au 19 septembre 2014

L’adieu à la peinture de Marcel Duchamp

 Portrait multiple
Portrait multiple - Photo : Anonyme / Centre Pompidou, MNAM-CCI, RMN / G.Meredithchian
Il a inventé l'art conceptuel. Bouleversé notre idée du beau. Mais avant d'être le pape de l'art contemporain, Marcel Duchamp était peintre. Retour sur une métamorphose en cinq étapes.

1927. La porte de l’appartement du 11, rue Larrey à Paris, dans le 5e arrondissement.  


Où l'on découvre l'ingéniosité de Marcel, son esprit pratique et son sens inné de la récupération.
C'est un minuscule deux-pièces situé au septième étage d'un immeuble de la rue Larrey, dans le 5e arrondissement de Paris. Le futur pape de l'art contemporain l'a loué en 1926 avant de partir à New York pour exposer et vendre les sculptures de son ami Brancusi. Les WC sont sur le palier. Il n'y a pas de salle de bains. Marcel ne peint plus depuis 1918 – son dernier tableau, Tu m', lui a été commandé cette année-là par l'une de ses amies, l'artiste et mécène américaine Katherine Dreier ; il écrit, il bricole, il réfléchit. Il joue aux échecs. Il invente des choses inutiles. L'appartement sera son atelier.
A la fin du mois de février 1927, Marcel rapporte de New York une quinzaine de sculptures de Brancusi, qu'il espère bien revendre en France. Son père, notaire en Normandie, a subvenu à ses besoins jusqu'en 1925, date de sa mort, et Marcel, qui vient d'investir sa part d'héritage dans l'achat de ces sculptures, escompte en tirer un solide bénéfice. Il retrouve le petit appartement de la rue Larrey, qu'il retape sommairement, aidé par deux amis : le photographe Man Ray et le peintre et sculpteur biélorusse Antoine Pevsner.
Marcel a 39 ans. Il est célibataire. « Un peu fatigué de cette vie vagabonde », il pense à se marier. Son ami le peintre Francis Picabia lui présente une jeune et riche héritière, Lydie Sarazin-Levassor, petite-fille de l'industriel Emile Levassor, créateur avec René Panhard de la célèbre marque automobile.
La rumeur colporte que Marcel épousa Lydie pour son argent. Lydie décrit en effet, dans Un échec matrimonial (1), le désappointement de Marcel quand le notaire, lors de la signature du contrat de mariage, annonce la faible rente allouée par le futur beau-père – il avait « l'impression désabusée de quelqu'un qui s'aperçoit avoir fait fausse route ». Et Marcel n'est pas amoureux. Depuis trois ans, il a une liaison avec une Américaine installée à Paris, Mary Reynolds.

Photo  : Succession  Marcel Duchamp
/ADAGP
Photo : Succession Marcel Duchamp
/ADAGP
Pour mieux accueillir Lydie, Marcel installe dans son atelier une douche : un cagibi sans fenêtre construit dans la chambre, muni d'un plancher surélevé afin que l'eau usée file directement dans la gouttière. Deux marches y mènent. Reste le problème de la porte. La douche ne peut rester fermée à cause de l'absence de ventilation. La solution serait d'installer une porte entre la chambre-douche et l'atelier-salon-cuisine. Mais la lumière provient d'une fenêtre située entre la salle de bains et le lit : fermer la porte de la chambre priverait l'atelier de lumière. Que faire ?

Marcel esquisse un croquis qu'il confie à un menuisier : une seule porte, pivotant sur ses gonds, ferme soit l'atelier, soit la salle de bains. Ainsi, lorsqu'elle ferme la salle de bains, l'atelier est ouvert, et lorsqu'elle ferme l'atelier, la salle de bains est ouverte. La solution est ingénieuse. Marcel l'accompagne de l'une de ses habituelles plaisanteries : « Je montrai la chose à des amis en leur disant que le proverbe "il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée" se trouvait ainsi pris en flagrant délit d'inexactitude. »

Evidemment, puisqu'il s'agit de Duchamp, les choses n'en restent pas là. En 1963, la porte fut vendue à un marchand d'art. Une réplique fut réalisée et exposée lors de la première rétrospective de l'œuvre organisée cette année-là par le musée de Pasadena, en Californie. « Mais on a oublié la raison pratique qui m'avait dicté cette mesure pour ne retenir que le défi dada », avait dit Marcel dans un entretien aux Nouvelles Littéraires en 1954.

Depuis, comme tous les objets duchampiens, la porte suscite une glose extraordinaire. On lui trouve des valeurs symboliques (elle est une limite, elle enferme et libère, etc.), des connotations sexuelles (le battant entre dans le chambranle) ; on voit même dans ce battant fermant deux portes une image de la bigamie de Marcel, alors partagé entre Lydie et Mary (2).

1918. « Tu m' ».

Où l'on découvre la relation amphibolique (pour reprendre un mot duchampien) et passionnelle que Marcel entretient avec la peinture.
Marcel traîne les pieds, mais il n'a plus le sou et la commande de Katherine Dreier est alléchante. Elle veut un tableau en longueur, de dimensions étranges (69,8 × 313 centimètres), pour l'installer au-dessus de sa bibliothèque. Marcel ne peint plus depuis cinq ans. Il n'en a plus envie. Et puis peindre quoi ? Il décide de faire un inventaire – « un résumé des choses que j'avais faites plus tôt », dit-il. Il dessine les ombres portées de La Roue de bicyclette (un assemblage de 1913), du Porte-chapeaux (un ready-made de 1917, soit un objet quelconque exposé comme une œuvre d'art) et d'un tire-bouchon (un projet de ready-made non réalisé), puis colle les règles en bois de Trois Stoppages étalon (1913-1914), et demande enfin à un peintre d'enseignes (A. Klang) de peindre une main.
En dehors de son titre ambigu (Tu m'), l'œuvre fonctionne comme un rébus. Elle dit la méfiance de Marcel vis-à-vis de l'art (le ready-made est, selon Duchamp, une « provocation » destinée à « décourager le carnaval d'esthétisme »). Elle dit son goût pour le jeu et le hasard (les Trois Stoppages étalon sont trois fils à coudre d'un mètre, tendus horizontalement, et lâchés d'une hauteur d'un mètre sur une toile – les règles étant, elles, des plaquettes de bois reprenant sur un côté la forme courbe des fils tombés).

Elle dit aussi son désamour pour la peinture (l'exécution de la main confiée à un artisan – si ce n'est pas Duchamp lui-même, caché derrière un pseudonyme). Mais l'a-t-il jamais véritablement aimée, cette peinture ? Marcel a très peu peint – et pas longtemps. Il fut à 16 ans un impressionniste tardif ; à 19, un fauve suiveur ; à 24, un cubisto-symbolique. A 26 ans, en 1913, il arrête – enfin… jusqu'à ce que Katherine Dreier lui passe cette maudite commande.

Tu m' Photo : The Philadelphia Museum of Art / Scala ADAGP
Entre-temps, il a échoué à l'examen d'entrée aux Beaux-Arts de Paris, et voit son Nu descendant l'escalier refusé au Salon des indépendants de 1912. Les cubistes ne veulent pas de ce tableau montrant la décomposition du mouvement d'un nu descendant un escalier inspiré par les chronophotographies d'Etienne Jules Marey. Albert Gleizes charge les frères aînés de Marcel, le peintre Jacques Villon et le sculpteur Raymond Duchamp-Villon, de lui annoncer la mauvaise nouvelle.

L'année suivante, en 1913, une seconde version de ce tableau sera présentée à l'Armory Show à New York, où elle fera scandale et assurera néanmoins à Marcel une solide réputation d'artiste d'avant-garde. On a beaucoup glosé sur ce Nu descendant l'escalier, refusé par les peintres à Paris et reconnu par une certaine bourgeoisie à New York. Qui croire ? La présentation d'un urinoir (Fountain) quatre ans plus tard au Salon des indépendants de New York agira comme une preuve par l'absurde de l'inconsistance du goût, que Marcel définit comme « une habitude ». Aucun visiteur ne verra cet objet choquant, signé d'un pseudonyme (R. Mutt), caché derrière une cloison par les organisateurs outrés. Mais son triomphe futur, une fois connu le véritable nom de son auteur, donnera raison à Duchamp : le goût est suspect.

Depuis, le Nu descendant l'escalier est devenu une icône – comme tout ce qui provient de Marcel. Mais est-ce un bon tableau ? Peut-on, ô sacrilège, émettre à son sujet quelques réserves ? A Pierre Cabanne, qui lui demande en 1966 ce qu'il pense de cette œuvre, Marcel répond simplement : « Je l'aime bien » (3). Puis il ajoute : « Il a mieux tenu que Le Roi et la Reine… » – un autre tableau cubiste de 1912 où s'exprime déjà le goût de Marcel pour le dessin mécanique.
Et si, comme le soutient Marcel lui-même, ses tableaux, comparés à ceux de Picasso et de Braque, par exemple, ne tenaient pas si bien que ça ? Autrement dit : s'il avait eu conscience très tôt que son talent de peintre n'était pas à la hauteur de son ambition d'artiste ?

1913. Erratum musical.

Où l'on découvre que le goût de Marcel pour le jeu et le hasard n'est que l'expression de son dégoût pour le goût.
Marcel est humilié par le refus de son Nu descendant l'escalier. La blessure est profonde. En 1959, il confiera à son ami le poète et critique Robert Lebel que cet incident « a déterminé en [lui], sans même qu'[il s']en rende compte, une complète révision de [ses] valeurs ». En cette année 1913, à New York, même si la seconde version du tableau offre à Marcel, dans un petit cénacle, une réputation d'artiste d'avant-garde, la réaction moqueuse du public hilare n'arrange rien. Il lui faut réagir. Mais comment ?

Nu descendant l'escalier n°2
Nu descendant l'escalier n°2 - Photo : Yale University Art Gallery / Bridgeman / Sucession Marcel Ducahmp / ADAGP
Au printemps 1912, accompagné d'Apollinaire et du couple Picabia, Marcel assiste à une représentation d'une pièce de théâtre de Raymond Roussel : Impressions d'Afrique. Il est frappé par « la folie de l'insolite » qui commande ce texte loufoque. Peu après, son ami Jules Romain lui offre un livre de Jean-Pierre Brisset, Les Origines humaines. Brisset et Roussel ont en commun l'excentricité et l'absurdité. « Quand on est mort, c'est pour longtemps », écrit Brisset, qui propose une théorie de l'évolution assez singulière : « L'homme est né dans l'eau, son ancêtre est la grenouille. » Et puis Brisset sature ses textes de calembours grivois, genre (de mauvais goût) dont raffole Marcel. Quand Brisset écrit : « Qui sexe queue use, sa queue use », Marcel répond, trente ans plus tard : « On a que : pour femelle la pissotière et on en vit » (La Boîte, 1913-1914).

Au-delà du jeu, Marcel trouve Roussel et Brisset révolutionnaires ; ils opèrent « une scission » et balaient le symbolisme et le romantisme ambiants. Reste à transposer cet univers absurde dans l'art. Curieusement, Marcel commence par la musique. En bon fils de notaire, il a appris enfant le solfège, mais son projet a peu à voir avec l'écriture d'une véritable partition. L'œuvre, composée pour trois voix, s'intitule Erratum musical (1913). Il s'agit de la définition du verbe « imprimer » chantée « trois fois par trois personnes sur trois partitions différentes composées de notes tirées au sort dans un chapeau ». Ici, le hasard fait donc l'affaire. Le lâcher de ficelle de Trois Stoppages étalon (1913-1914) est du même tonneau. A travers ces expériences, Marcel cherche « la beauté d'indifférence », afin que l'œuvre échappe à la notion de goût, bon ou mauvais – échappe au goût du spectateur, donc, mais aussi et surtout à celui de son créateur. Dans cette intention, apparaît en 1914 le premier ready-made : un porte-bouteilles acheté au Bazar de l'Hôtel de Ville – « quelque chose d'une indifférence telle que vous n'ayez pas d'émotion esthétique », dit Duchamp.

1915-1923. Le Grand Verre.

Où l'on découvre qu'à force de fuir la tyrannie du goût Marcel réinvente la beauté, et qu'à force de fuir l'intention, l'inconscient revient au galop.
Marcel l'a fait pour s'amuser et amuser son frère Jacques. Ce dernier décore le mur de sa cuisine d'une frise de petits tableaux qu'il commande à ses amis. Marcel lui offre en 1911 une peinture représentant un moulin à café désarticulé. Le style est cubiste, mais l'aspect mécanique du sujet intéresse beaucoup Marcel, car il lui permet « d'éviter tout contact avec la tradition peinture-picturale ». Ainsi naît l'idée d'une autre forme « d'indifférence visuelle », basée sur le dessin mécanique, qui « ne supporte aucun goût puisqu'il est en dehors de toute convention picturale ». Ainsi naît l'idée du Grand Verre, dont Marcel souhaite qu'il soit « un tableau charnière ».

Le véritable titre du Grand Verre est celui de la deuxième pièce musicale, au protocole complexe, composée en 1913 : La Mariée mise à nue par ses célibataires, même. Il serait laborieux de décrire les étapes de sa réalisation (de 1915 à 1923), précédée d'œuvres préparatoires (Le Passage de la vierge à la mariée, 1912 ; La Mariée, 1912 ; La Broyeuse de chocolat nº2, 1914 ; Neuf Moules Mâlic, 1915 ; Glissière contenant un moulin à eau en métaux voisins, 1915). Une masse de notes accompagne sa genèse, mélange de calembours, de réflexions philosophiques, de remarques scientifiques (beaucoup d'auteurs, en particulier Jean Clair (4), ont étudié et commenté le rapport jubilatoire que Marcel entretenait avec la science), d'équations mystérieuses, de croquis, de listes énigmatiques (« enfant-phare, 5-nus, route Jura-Paris, etc. »).

Le résultat est un diptyque : deux panneaux de verre superposés – celui du haut censé représenter la mariée ; celui du bas, les neuf célibataires –, sur lesquels Marcel a collé les matériaux les plus divers, pourvu que ce ne soit pas de la peinture (huile, feuille de plomb, aluminium, fil à fusible, poussière, vernis, bois…). Le dessin y est soit le fruit du hasard, soit la représentation d'un objet mécanique bizarre. De cette œuvre sibylline d'une grande élégance (pour ne pas dire beauté), inachevée (« J'en ai eu assez et j'ai arrêté », dit Duchamp), sans doute, à cause de son hermétisme, l'une des plus étudiées, idolâtrées de l'histoire de l'art, son auteur dit l'avoir conçue « sans avoir d'idée », comme « un renoncement à toute esthétique ».

Le Grand Verre
Le Grand Verre - Photo : Sucession Marcel Duchamp / ADAGP
Malgré cette absence d'idée supposée, le thème du Verre est bien la femme (ici mariée). Or, ce thème éternel (des vénus préhistoriques à L'Olympia de Manet) traverse l'œuvre de Duchamp : les premiers portraits de sa sœur adorée, Suzanne (l'impossible amour, dit-on), le premier Nu vendu en 1910 à Isadora Duncan et le Nu descendant un escalier, deux ans plus tard. Et jusqu'à l'œuvre ultime, révélée après sa mort, Etant donnés… (1946-1966), montrant par deux trous pratiqués dans une porte en bois la photographie d'une femme nue, allongée sur un fagot de bois et tenant un bec Bunsen dans sa main gauche. On imagine la glose qu'a pu produire cette dernière installation chez les thuriféraires de Duchamp. Car Marcel fait parler et écrire. L'obscurité de ses formules et jeux de mots autorise toutes les interprétations. On l'imite. On lui prête des intentions, des calembours, des énigmes. On voit dans le titre du Grand Verre le prénom caché de Duchamp : MAR(iée) et CEL(ibataires). C'est admirable. 

1963. Musée de Pasadena, Californie.

Où l'on découvre que le monde de l'art, qui jusque-là ignorait l'œuvre de Marcel, se met brusquement, cinq ans avant sa mort, à l'adorer.
La rétrospective que le musée de Pasadena, en Californie, consacre à l'œuvre de Duchamp, le 8 octobre 1963, est très complète : elle débute par un Portrait du père de 1910, cézannien, et s'achève par Le Grand Verre de 1923. Pour la première fois les ready-made sont montrés. Pas les originaux, puisqu'ils ont été « égarés », mais des répliques réalisées par Duchamp lui-même, aidé par des photographies d'époque. Peu célébré en France, Duchamp, naturalisé Américain depuis 1955, est alors un personnage influent de la vie culturelle new-yorkaise. Aussi les jeunes artistes, Andy Warhol, Robert Rauschenberg ou Jasper Johns, se précipitent-ils à Pasadena. Ils vénèrent Duchamp.

Son œuvre, jusqu'à présent entrevue sur des photographies, les libère des conventions de l'art européen et leur permet d'envisager un art véritablement américain. Et puis, il y a eu la guerre, le massacre, la Shoah, l'horreur absolue, qui ont définitivement discrédité une certaine idée de la culture. Le goût bourgeois, ce fameux goût qu'exécrait Marcel en 1913, contre lequel son œuvre a combattu, ce goût devient suspect aux yeux de tous. Jamais le ready-made et la conceptualisation de l'art entreprise par Duchamp quarante ans plus tôt n'auront autant été d'actualité.

Marcel est devenu un dieu. Ses œuvres sont des reliques – ou des idoles. Pourtant, Erratum musical reste inaudible, comme les ready-made sont invisibles. Exposer les répliques du Porte-bouteilles ou de Fountain relève, sinon de l'imbécillité, du moins d'un fétichisme fanatique. L'objet en soi n'a aucun intérêt. Ce qui importe, c'est la façon dont il nous a obligés à penser l'œuvre autrement : sa conception, sa fabrication, sa nature. « C'est le regardeur qui fait l'œuvre », disait Duchamp, et cette œuvre n'est pas forcément de la peinture sur une toile ou une statue en bronze – un changement radical de perspective, en somme, qui le mène, lui, à réaliser Le Grand Verre.
Fountain
Fountain - Photo : Centre Pomidou / RMN / C. Bahier / P. Migeat
Ainsi, Duchamp s'impose au milieu des années 60, avant de mourir en 1968. La recherche moderniste ayant, semble-t-il (mais est-ce si sûr ?), épuisé toutes les formes (que faire après l'abstraction et tous les genres en -isme : cubisme, expressionnisme, tachisme, etc. ?), c'est aux canons de l'œuvre (et donc de l'art), à ses conventions, à ses normes, à ses modèles, à ses limites que l'art post-moderne – sous l'influence de Duchamp – va s'attaquer à travers l'art conceptuel, le pop, le happening, l'installation, etc.

Mais, le temps passant, cette recherche est devenue la norme – qu'il faudra bien un jour, si l'on suit l'esprit de Duchamp, renverser. Et Marcel est devenu, malgré lui, une institution – ce qu'il détestait jusqu'au dégoût. Car, pour lui, l'institution est ce qui impose des standards et des limites à la création, ce qui entrave la liberté, cette liberté que Marcel opposa à la beauté prisonnière du goût. Car s'il y a une chose avec laquelle Duchamp n'a jamais transigé – et sa vie et son œuvre le prouvent –, c'est bien avec la liberté.

(1) Ed. Les Presses du réel.
(2) Selon Philippe Renaud, dans Marcel Duchamp ou Les Mystères de la Porte, éd. Coaltar.

(3) Dans Marcel Duchamp, entretiens avec Pierre Cabanne, éd. Allia/Sables.
(4) Sur Marcel Duchamp et la fin de l'art, éd. Gallimard. A lire aussi : Marcel Duchamp, de Bernard Marcadé, éd. Flammarion. Sur Duchamp et la musique : Les Opérations musicales mentales de Duchamp, de Sophie Stévance, www.imagesrevues.revues.org/375

A voir: « Marcel Duchamp. La Peinture, même », du 24 septembre 2014 au 5 janvier 2015, au Centre Pompidou à Paris.