MCmarco et Louise. Cliché de Malik Sidibé. Nantes. décembre 1996
Disparition du photographe malien Malick Sidibé
Par Roxana Azimi (contributrice Le Monde Afrique)
LE MONDE
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C’était le chroniqueur de la jeunesse du
tout-Bamako des années 1960-70. Le photographe malien Malick Sidibé
s’est éteint à Bamako le 14 avril à l’âge de 80 ans.
Né à Soloba dans une famille
peule, Malick Sidibé se forme d’abord à la bijouterie avant d’apprendre
la photographie en 1955 auprès de Gérard Guillat, alias « Gégé la
Pellicule ». Trois ans plus tard, il ouvrira son propre studio à Bamako
dans le quartier de Bagadadji. Si le grand maître malien de l’époque,
Seydou Keïta, photographie à la chambre les élégantes posant de biais
–sa marque de fabrique –, son cadet se reporte sur des sujets plus
populaires. « Seydou, c’était la grande classe des fonctionnaires,
avec des hommes richement habillés qui couvraient leur dame de chaînes
en or. Moi, c’était la classe moyenne ; on pouvait même poser avec un mouton », racontera-t-il au Monde.
Armé d’appareils légers, Malik Sidibé ira surtout sur le terrain humer
l’air de son époque. Son champ d’action ? La jeunesse endimanchée et
insouciante, les zazous friands de twist, de rock et autres danses
cubaines.
« Trésor national »
Le photographe sera de toutes les fêtes, de celles qui s’éternisaient jusqu’à l’aube le long du fleuve Niger.
Durant ces décennies, il développera une autre spécialité, les femmes
prises de dos, qu’il reprendra à la fin des années 1990. « C’est lui qui a reconnu les photos d’un photographe inconnu que je recherchais, Seydou Keïta », se souvient le marchand André Magnin, qui lui organisera en 1995 une exposition à la Fondation Cartier à Paris, un an après sa présentation aux Rencontres de la photographie de Bamako. Et d’ajouter : « Il était généreux, toujours souriant, timide, mais au regard acéré. Il a su saisir
les instants magiques d’une jeunesse moderne qui vit son indépendance,
la liberté. Il était considéré comme un maître par les plus jeunes comme
Omar Victor Diop. »
En 2003, le « trésor national » malien reçoit le prestigieux prix international
de la photographie Hasselblad, décerné pour la première fois à un
photographe africain. Quatre ans plus tard, c’est la consécration, il
est récompensé du Lion d’or à la Biennale de Venise. Lorsque nous nous
étions rendus en octobre 2015 à Bamako, sa santé ne lui permettait déjà
plus de se rendre à son studio tenu désormais par l’un de ses fils.