DSK et le concombre
Un peu d'analyse d'image par l'actualité. (18 juin 2011)
Le quotidien Libération, devenu par excellence le média du "spectaculaire intégré" se vautre comme le dit plus loin André Gunther dans la honte avec cette Une.
On lui préfèrera évidemment celle-ci.
En se faisant le porte-voix des délires gouvernementaux, le Libération de Joffrin avait atteint son seuil d’incompétence avec la Une “L’ultra-gauche déraille“. On se souviendra que le Libé de Demorand a franchi aujourd’hui le mur de la honte avec l’incroyable “Not guilty“.
“Not guilty“? On dira qu’il
ne s’agit que du relevé objectif de l’information de la veille: la
décision des défenseurs de Strauss-Kahn de plaider non coupable. Mais
il faut lire l’article consacré par Mediapart à l’invention de la soubrette, qui raconte comment cette fonction fut intégrée à la sexualité domestique, avec la bénédiction de la maîtresse de maison,
pour comprendre à quel point l’image matrimoniale qui illustre
l’énoncé “non coupable” – Strauss-Kahn aux côtés d’Anne Sinclair, une
ombre de sourire aux lèvres –, incarne jusqu’à la caricature
l’inconscient de la bourgoisie.
Comme dans le lapsus de Jean-François
Kahn, qui lève le voile sur un monde ou le “trousseur de domestique” ne
fait qu’accomplir les prérogatives dues à son rang, le soutien de
l’épouse légitime parachève la figure d’une innocence de classe que les
strauss-kahniens brandissent depuis le 15 mai. Le Figaro ne s’y est pas trompé, en choisissant lui aussi une photo du couple
– dans une frontalité plus combative. En resserrant le cadre sur
l’image touchante du ménage réuni, derrière les sourires un peu peinés
de la gentry malmenée, mais sûre de son bon droit, la Une de Libé a choisi son camp. “Not guilty“.