Sarah Sze
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Fondation Cartier 1999 |
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Offset 2005 |
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Triple point 2013 |
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Biennale de Venise 2013 |
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Biennale de Venise 2013 |
du Site du
MUDAM (Luxembourg)
Depuis une quinzaine d’années, l’artiste new-yorkaise Sarah Sze
développe un travail d’une grande cohérence, qui a donné naissance à des
installations fourmillant de détails et jouant avec la configuration
spatiale. Ses œuvres, réalisées spécifiquement pour chacun des lieux où
elles sont exposées, sont généralement composées d’une multitude
d’objets de pacotille et d’usage courant, dont la sélection n’est
nullement aléatoire mais effectuée au contraire avec une grande
précision en fonction de leurs qualités formelles ou de leur polysémie.
Aux
objets récupérés se mêlent de petites constructions faites à la main à
partir de matériaux « pauvres », tels qu’allumettes, fils ou papier,
qui, grâce à leur ordonnancement presque archivistique, dessinent dans
l’espace les lignes d’une composition savamment élaborée.
Les travaux de Sarah Sze créent des univers ouverts,
à la diversité encyclopédique et archéologique. Ils possèdent la
précision des constructions architecturales, évoquent des compositions
picturales par la subtilité des formes et des couleurs, jouent des mises
en abyme à la façon des sculptures aux perspectives multiples et
offrent une dimension quasiment musicale. L’artiste orchestre une
multitude de détails, développe des thèmes musicaux complexes, accorde
des mélodies visuelles à des contrepoints formels au sein d’une
composition d’ensemble à la monumentalité éthérée. Elle conçoit des
paysages de nature abstraite inspirés de l’art des jardins sino-japonais
qui, malgré l’apparente absence de hiérarchie entre les éléments,
parviennent à guider le regard et à créer des mises en scène.
Conçues fréquemment pour des lieux discrets comme des escaliers, des
cagibis, des recoins ou des embrasures de fenêtres, parfois en suspens
et toujours d’une légèreté ludique, les œuvres de Sarah Sze posent des
questions générales sur le rapport d’échelle, le grand et le petit, le
lourd et le léger, le lointain et le proche. Elles interrogent leur
propre temporalité, le degré de complexité de leur production, ou leur
fugacité. Dans certains cas, elles questionnent le lieu où elles sont
exposées, l’espace - idéel et matériel - de l’art dans lequel
l’observateur pénètre, la plupart du temps sans y prêter attention.
Elles incitent finalement ce dernier à se plonger dans une intense
activité de contemplation et exige même de lui une conscience aiguisée
quant au positionnement de son regard. De la même manière que les
structures sibyllines des installations de Sarah Sze pourraient
dissimuler une représentation abstraite de sa personnalité, elles
permettent chez l’observateur une prise de conscience de son propre
regard et, par ce biais, de son être. Immenses maquettes scientifiques
de microcosmes élégants et méditatifs, les travaux de Sarah Sze semblent
commenter nos comportements et notre rapport au monde.
Sur le site de Sarah Sze, de nombreuses images de l'ensemble de ses installations, depuis son travail d'étudiante en 1997, jusqu'à la Biennale de Venise en 2013 :
http://www.sarahsze.com/
Thomas Hirschhorn
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Palais de Tokyo 2014 |
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Palais de Tokyo 2014 |
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Palais de Tokyo 2014 |
Du site du
Palais de Tokyo, Paris.
Depuis sa « première exposition » à l’Hôpital Éphémère
(1992), Thomas Hirschhorn (né en 1957, vit et travaille à Paris) a
réalisé de nombreux projets marquants à Paris : Jeu de Paume (1994) ;
« Swiss-Swiss Democracy » (Centre Culturel Suisse, 2004) ; « Musée
Précaire Albinet » (2004)… Dix ans après « 24H Foucault », Thomas
Hirschhorn revient au Palais de Tokyo pour présenter « Flamme
éternelle ».
La plupart des œuvres de Thomas Hirschhorn jouent avec des formes
familières et urbaines évoquant l’étal, le marché aux puces, le pamphlet
ou sa forme placardée comme le dazibao de la Chine populaire.
« Kiosques », «Monuments », « Autels », « Sculptures Directes »
constituent une véritable typologie de dispositifs fonctionnels ou
votifs. Les « Kiosques » sont inspirés des structures de propagande
développées par le constructivisme russe, les «Monuments » rendent
hommage à l’œuvre de penseurs (Spinoza, Bataille, Deleuze, Gramsci) et
les « Autels » évoquent les commémorations urbaines spontanées. Si les
« Sculptures Directes » sont habituellement installées dans les
institutions, la première version s’est suggérée à l’artiste par le
détournement de la Flamme de la liberté (quai de l’Alma, Paris) en autel
votif consacré à la princesse Diana.
Du site du quotidien "Le Monde" à propos de l'exposition au Palis de Tokyo en lai 2014
Seul Thomas Hirschhorn pouvait imposer une telle révolution au Palais
de Tokyo. Dicter sa loi, celle d'un certain chaos. Et convoquer, au
rez-de-chaussée du centre d'art parisien, 16 500 pneus et 180 penseurs.
Equation incongrue, à laquelle s'ajoutent quelques braseros : le genre
d'ustensiles que n'apprécient guère les institutions culturelles. Pas
peur de mettre le feu : le célèbre plasticien helvéto-parisien, qui
représenta son pays d'origine à la Biennale de Venise 2011, est un
bagarreur, autant qu'un rhéteur. Une « Flamme éternelle » l'anime, comme
le suggère le titre de son exposition.
Enfin, exposition… Le terme ne convient guère à ce paysage évoquant
l'émeute autant que le garage de pays lointain, l'agora foutraque et
l'atelier constellé de Scotch (une de ses marques de fabrique). Des
milliers de pneus, donc, qui rappellent « toutes les barricades, la
place Maïdan , mais aussi l'invention de la roue, le déchet à recycler.
Comme le Scotch, cette matière très riche me plaît par son côté
universel, non intimidant ». Superposés, balancés,
détournés, ils structurent l'espace en différentes « salles et
accueillent l'essentiel : ces poètes, philosophes, écrivains, que
Hirschhorn convie chaque jour à partager avec le public. Sous quelle
forme ? Il n'a rien planifié, certain que ce chaos donnera naissance à
des instants de grâce. « J'ai simplement créé un récipient, une situation qui invite les autres à être présents et donne envie d'être actif avec sa pensée », ...
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Thomas Hirschhorn musée précaire Albinet |
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Thomas Hirschhorn musée précaire Albinet |
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Thomas Hirschhorn musée précaire Albinet |
Du site critique d'art / revues / :
http://critiquedart.revues.org/1277
Entre avril et juin 2004 s’est ouvert, rue
Albinet à Aubervilliers, sous l’impulsion conjuguée de Thomas Hirschhorn
et des Laboratoires d’Aubervilliers un musée pour le moins inhabituel,
dont la vocation fut de « faire exister l’art au-delà des espaces qui
lui sont consacrés ». Ce musée prit d’autant plus de poids pour
Hirschhorn qu’il a installé en 2001 son atelier dans une rue voisine.
D’autre part cette nouvelle réalisation s’inscrit comme le prolongement
du Deleuze Monument présenté à Avignon et qui fut victime de vandalisme.
Réponse
à l’invitation consistant à réaliser une œuvre dans l’espace public, ce
projet – apparemment aussi utopique que risqué – fut un véritable défi
collectif à même de toucher un public habituellement laissé en marge de
la fréquentation des œuvres. Durant trois mois, des cimaises de fortune
présentèrent un aperçu de l’art du XXe siècle au travers de quelques
artistes incontournables : Marcel Duchamp, Kasimir Malevitch, Piet
Mondrian, Salvador Dalí, Joseph Beuys, Le Corbusier, Andy Warhol et
Fernand Léger. Pour donner un poids véritable à cette démarche, il
importait d’amener dans ce quartier pauvre non pas des reproductions
mais les œuvres originales elles mêmes et de les confier le plus
largement possible à la population locale.
Pour ce faire, gardiennage,
montage, démontage et animation du lieu furent confiés à des jeunes
recrutés sur place et formés à cet effet. Le challenge consistait donc à faire quitter à certains trésors de
l’art contemporain leur écrin doré pour une structure de bric et de
broc installée sur une friche urbaine. En guise de salle d’exposition un
Algeco agrémenté de constructions légères pour accueillir la
bibliothèque et la salle de conférences, débats et autres ateliers qui
ponctuèrent ces trois mois. Tout dans cette réalisation ramène à une
économie radicale de la précarité, l’utilisation de matériaux pauvres :
bois, plastique d’emballage, carton, scotch, photocopies, inscriptions
aux marqueurs sont autant de signes de la fragilité et de la dimension
éphémère du lieu. Par le biais d’appels à la mobilisation des structures
locales et la sollicitation des bonnes volontés disponibles, la
pertinence de ce projet réside dans la démonstration que l’art est une
véritable force transformatrice, que cela soit en ouvrant pour la
première fois la porte d’un musée à certains ou en offrant une formation
à d’autres.